Peu de temps après la mort de l’Empereur Napoléon III, le 9 janvier 1873, l’Impératrice Eugénie en exil en Angleterre depuis près de trois ans souhaita voir avancer les longs débats concernant la possibilité de recouvrer les biens censés lui appartenir personnellement, en particulier l’ensemble des objets constituant la collection du Musée Chinois de Fontainebleau.
On sait que l’arrivée à Paris des œuvres d’art saisies par les militaires français lors du sac du Palais d’été à Pékin en octobre 1860, ainsi que les cadeaux offerts par l’ambassade de Siam en juin 1861 avaient été à l’origine de la création du Musée Chinois dans le château de Fontainebleau. L’impératrice, qui appréciait l’exposition ensoleillée du rez-de-chaussée du Gros Pavillon, à proximité de l’étang des carpes et du Jardin anglais, avait demandé à Pacard, son architecte, d’aménager un grand salon pour s’y tenir lors de ses séjours d’été. Fort admirative des nombreux objets exotiques qu’elle avait d’abord fait exposer aux Tuileries, elle souhaita alors les installer dans une pièce adjacente à ce salon. Eugénie avait elle-même veillé à la mise en place du décor de laque et d’or, des toiles de soie tendues au plafond, des précieux bibelots installés dans des étagères faites à la mesure, des consoles, des vases montés en lampes… Peu à peu le Musée s’enrichit d’autres objets orientaux, en particulier des cadeaux personnels de l’Empereur à son épouse lors des fêtes de la sainte Eugénie. En 1868 fut créé pour elle un cabinet de travail dans le même esprit oriental, dont elle ne profita pas en raison de la guerre franco-prussienne et de la chute du Second Empire.
Mais, lors de la liquidation de la liste civile de l’Empereur, de longues discussions eurent lieu entre les représentant de l’Etat et les membres de la famille impériale. Il fut évoqué l’idée de rendre à l’ex-Impératrice la collection des objets enlevés au Palais d’été à Pékin. Après consultations de différents députés et d’âpres discussions entre les membres des deux commissions successives, après une visite à Fontainebleau de trois de ces membres chargés d’apprécier les conditions matérielles du musée, il fut décidé à la majorité des votes que les quatre cents dix-huit pièces expertisées et inscrites au catalogue, quelle qu’en soit leur provenance, deviendraient propriété de l’Etat. Ce vote eu lieu le 27 mars 1873, puis fut contesté, rejugé et ne fut définitivement réglé qu’en 1879.
Après un long sommeil d’un siècle, le salon du Lac, le Musée Chinois, durant les années 1980/1990 puis plus récemment le Bureau de l’Impératrice, furent restaurés tels qu’ils avaient été voulus par l’Impératrice Eugénie, retrouvant ainsi leur beauté, témoignage éclatant de quelques-unes des mille merveilles du château de Fontainebleau.
Hélène Verlet